A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou
Le Martray - quartier de Loudun
sa porte, son église
Jean-Claude Raymond Fernande Germain, Jérômr Moreau
Table des matières
Martray, ce nom évoquerait les martyres de Saint Clair et de Saint Lucain qui animèrent la première communauté chrétienne loudunaise. Le Martray fut primitivement un bourg hors les murs de Loudun. Il fallut attendre le XIIIe siècle pour que les murs de Loudun l'englobent.
La Porte du Martray illuminée (Loudun — Vienne — France)
(Sans date) © Avec l'aimable autorisaton de J.-M.Cailleau
Porte du Martray.
Un peu au-dessous de Saint-Pierre, le rue descend et passe sous un débris de l'enceinte de Loudun, la vieille porte du Martray percée, ébréchée, en ruines ou à peu près. A droite et à gauche des maisons qui s'accrochent à ses tours et leur accolent des appentis divers, des boulevards solitaires tournent le long de restes de remparts, visibles quelques fois ou enfermés dans les jardins.
A. Robida
in La Vieille France
On remarquera sur la gravure (fin 19e siècle)des fenêtres au rez-de-chaussée qui ont été supprimées dans l'état actuel (fin 20e siècle pour la photo). On peut aisément concevoir que les fenêtres n'étaient pas d'époque et contraires à la fonction de défense de cette porte intégrée dans l'enceinte de la forteresse loudunaise.
Église du Martray (Loudun — Vienne — France)
(Vers 1930) © Avec l'aimable autorisaton de J.-M.Cailleau
L'église Saint-Hilaire, consacrée à Saint-Pierre avant 1803 lorsque le culte y fut rétabli. La salle capitulaire et quelques vestiges du cloître sont les restes d'un couvent des Carmes. C'est dans ce dernier que fut condamné Urbain Grandier.
L'église
se distingue :
Cette chapelle de la Vierge, autrefois appelée Notre-Dame-de- Recouvrance, est de style ogival. Sa longueur à partir du jambage, à droite du portail est de 12 mètres et sa largeur de 3,50 m dans l'œuvre ; la hauteur de la voûte sous la clef est de 8,60 m. Elle communique avec la nef de l'église par trois arcades en ogive. L'encadrement de ces arcades se termine par des crochets en feuilles de chardon. La clef porte un petit buste qui représente Dieu le Père.
La seconde arcade est ornée de feuillages et de quelques personnages du côté de la chapelle. Cette sculpture se termine vers le haut par deux animaux, celui de droite semble porter un autre petit animal.
Les clefs de voûte portent des écussons.
Dans le mur du midi se trouve un genre de chapelle ou enfeu dont l'archivolte, qui se courbe en ogive obtuse, est ornée de feuilles de laurier et de houx. C'était sans doute un espace réservé au tombeau du fondateur ou de quelque grand personnage.
La partie la plus remarquable de cette chapelle est sans aucun doute l'autel baroque offert par le cardinal de Richelieu et le tableau de la Vierge à l'Enfant.
Auguste-Louis Lerosey
Loudun
Ce chef d'œuvre qui orne l'autel de la Sainte Vierge est sans contredit d'une grande valeur artistique. On avait attribué la donation à René d'Anjou ; mais cette attribution est toute gratuite et le tabelau ne porte ni son nom ni ses armes. L'excellence de l'œuvre est manifeste. « Penchées l'une sur l'autre, la tête de la Vierge et celle de son fils sont d'une exquise suavité. On ne peut trouver rien de plus charmant ni de plus élevé. Le peintre, avec un talent remarquable, a su rendre le sentiment de vénération profonde qui se mêlait de deux parts à la plus tendre affection. Et la recherche de cette double expression n'a nullement nui à ses qualités de dessinateur et de coloriste. Le corps de l'enfant, en particulier, à demi enveloppé dans une gaze légère, est admirable en tout point. Chez la mère comme chez le fils, les chairs sont d'un ton uniformément blanc que relève seulement à la partie inférieure de la figure une légère application de rose. »
La tradition locale attribue l'œuvre à Nicolas Froment. Monsieur Léon Palustre le donne à Coppin Delf, peintre du XVe siècle. Certains y voient une production de l'école italienne. Ce panneau ne viendrait-il pas, en effet, de la munificence du cardinal de Foix, mort à Rome en 1490 ? Le débat reste ouvert.
Le tableau, dont la hauteur mesure 1,08m et la largeur à 0,78m présente un magnifique fond vert olive, très habillement choisi pour faire valoir le rouge du manteau. Quand au cartouche noir sur gris qui se détache à la base, il porte en lettres d'or ces mots :
SVMMI VIRGO PARENS INVIOLATA DEI
(La Vierge mère immaculée de Dieu très haut.)Auguste-Louis Lerosey
Loudun
Ce grand vitrail du chevet de l'Église du Martray, un des plus vastes du diocèse, est de l'année 1892. Il représente la Transfiguration, d'après des dessins de Raphaël, commandé à Julien Fournier, maître verrier à Tours. Huit mille francs furent employés à cette composition qui eût demandé une somme plus élevée pour être traitée avec toutes les ressources du grand art. Aussi des travaux furent à nouveau réalisés entre décembre 1991 et mars 1993 : on restaura l'archivolte et le vitrail préalablement déposé et refit le fenestrage qui n'avait pas pu être récupéré. »
Société historique du pays Loudunois
Le grand vitrail du chevet de l'église du Martray — Loudun (Vienne — France)
(Sans date) © Avec l'aimable autorisaton de J.-M.Cailleau
Épitaphe à la mémoire du seigneur de Falourdet, écuyer, mort en 1616 par Louis de Lormeau, gouverneur de Ronnay.
Las que l'heur est léger des fragiles humains,
Que fresle est le plaisir et leur bien peu durable,
Tu en fais, Farloudet, un essay1 lamentable,
Ton trépas nous causant des regrets inhumains !
Ton cœur qui fut porté aux généreux desseins
Tes services rendit aux princes agréables.
Tu fus modeste, accort, discret, honneste, aimable,
Bien que tu n'eus que sept lustres2 atteints.
Ton esprit vif et prompt, ton heureuse mémoire,
Ta bonté, ta vertu, t'acqueroient de la gloire.
Mais au lieu de cueillir le fruit de ton souhait,
La Parque inexorable extrême en violence
Au milieu de son cours fauche ton espérance
Ne pouvant voir florir un homme si parfait !A. Robida
in La Vieille France
Épitaphe de Louis de Lormeau dans l'église Saint-Hilaire-du Martray à Loudun
Notes
Commémoration de l'incendie du couvent des Carmes du 1568-11-20 par les Huguenots.
L'église
Saint-Hilaire du Martray a été témoin des grands moments de ma famille.
L'évocation de cette église me rappelle une foule de souvenirs. Une
seule maison séparait la maison de mes parents du presbytère. Mes
grands-parents habitaient rue du Vieux Cimetière : à deux pas
de la Porte du Martray. Mes parents s'y marièrent, le 1919-08-30. J’ai
été tenue sur les fonds baptismaux en juin 1920. J'y ai fait ma
communion solennelle en juin 1931 et m'y suis mariée, le 1941-04-19.
Lorsqu’enfant
j’allais à la messe j’étais séduite par les personnages et les couleurs
des tableaux qui s'y trouvaient. Et malgré moi, mon esprit divaguait
bien loin des ferveurs religieuses pour me retrouver à rêver sur ces
images. Les dimensions du vitrail
qui s'étend sur tout le chevet et qu'il éclaire de multiples couleurs,
m'impressionnaient même si à cette époque là je ne pouvais imaginer ce
que signifiait la Transfiguration
qu'il représente.
Lors des
offices, lorsque le prédicateur montait en chaire pour son sermon, je
le voyais gravir, lentement et avec solennité, les quelques marches en
bois impeccablement cirées et prendre place au-dessus de nous dans ce
qui me paraissait un véritable édifice sculpté. Il avait rejoint les
personnages majestueux des tableaux et du chemin de croix. Sa voix
résonnait de l'autorité de ces personnages.
Enfant, comme
j’habitais tout près de l’église, je voyais arriver avec joie le mois
de mai pour aller chaque soir au Mois
de Marie. La réunion se tenait
dans la chapelle Notre-Dame-de-Recouvrance, on pouvait admirer ce
retable d'une beauté remarquable représentant la Vierge-à -l’Enfant.
J'admirais les visages purs et doux de l'enfant Jésus et de la Vierge.
Ils étaient pour moi l'évocation du bonheur. La richesse des tissus, la
finesse du tulle finement esquissée m'émerveillaient. Qui n'aurait pas
désiré avoir de tels atours. Les soirs de mai, avec le printemps
naissant, c’était un plaisir pour une petite fille de chanter « C’est
le
mois de Marie, c’est le mois le plus beau ».
Chose assez
rare, on pouvait y voir les photos des enfants de chœurs qui étaient là
d’années en années. Nous retrouvions les jeunes connus du quartier pour
les années les plus récentes — une sorte de notoriété pour eux. Cela se
passait en 1928-1930. Lors de ma dernière visite en 2005, j'ai revu ces
photos. Elles sont toujours à la même place. Et lorsque l’église est
ouverte (malheureusement ce n’est pas assez souvent pour celui qui
apprécie les beautés liturgiques) c’est toujours avec joie que je viens
revoir un de mes petits cousins, qui avait 12 ans à l’époque ou mon
parrain qui était suisse avec son bel habit, sa barrette à cornes, et
sa canne à pommeau.
Je ne peux
clore cette description de l’église sans vous parler de l’autel de
Sainte-Radegonde. Enfant, j’étais très impressionnée par cet autel car
en plus des ex-voto accrochés aux parois il y avait des
reliques, des objets, qui rappelaient les grâces accordées par cette
sainte, avec tout ce que cela implique d’étonnement…
A l’extérieur
de l’église Saint-Hilaire-du-Martray, il y a les restes d’un cloître
des Carmes dont la salle capitulaire ou la Chapelle de la Bonne mort.
Urbain Grandier y a été jugé. Pour ce qui est du nom Chapelle de la bonne Mort,
comme elle se trouvait près de l’ancien cimetière des huguenots, elle
aurait servi, en cas de découvertes de squelettes humains, de chapelle
afin qu'ils aient les dernières prières avant l’au-delà.
Lors de ma communion
solennelle, aux vêpres, le prêtre nous amena dans cette salle
capitulaire pour nous recueillir. J’avouerai que je n'ai pas
apprécié cette dernière station. L'endroit est lugubre, nous savions qu’Urbain
Grandier y avait été jugé, d’une part et d’autre part situé
en sous-bassement, il ressemblait un peu à un cachot.
Nous n’allons
pas quitter l'église du Martray sans parler de l’abbé Dupuis. Un prêtre
remarquable qui était très en avance sur son temps. Nous le
connaissions très bien. Il était notre voisin de jardin et ma famille
avait un ami commun : Marcel Renault avec qui il
faisait des essais d’inventions. On m'a raconté qu'ils avaient
construit un poste à galène pour recevoir les ondes radio. Ils avaient
trouvé le moyen de faire un projecteur cinématographique. Chaque
dimanche après-midi, après les vêpres, les enfants de la paroisse
avaient leur séance de cinéma. Pour salle, il avait restauré une grande
remise, près du presbytère. Des chaises ou des bancs y étaient
installés, avec une allée centrale dans laquelle il mettait son
projecteur, et ainsi nous pouvions assister, à notre séance, pour
terminer notre dimanche. Je me souviens qu’il avait passé le film
Surcouf qui m’avait enchanté. On peut retrouver sur le livre Histoire des rues de Loudun,
tome Le bourg du Martray et le
faubourg du Vieux-Cimetière, page 74, C - La
restauration du presbytère, on voit nettement le portail où se trouvait
cette salle transformée en cinéma.
Mon souvenir le plus marquant est mon mariage le 1941-04-19, au bras de mon père entrant dans l'église du Martray qui m’avait vu grandir. A la Marche nuptiale jouée au violon par mon parrain André Garnier, le suisse des années 1930, qui était monté à l’orgue pour avoir plus de résonance, ce fut un moment très émouvant. En plus, l’église était fleurie de bouquets de muguets tout autour du maître autel, par notre ami jardinier. Une seule chose manquait à notre cérémonie : la présence du curé Dupuis qui avait changé de cure dans les années précédentes, ce qui avait beaucoup peiné ses fidèles. La sortie de l’église au bras de mon époux a été mon meilleur souvenir.
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A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou vous remercie de votre visite
Dernière modification : 2011-06-01 - 10:07:22
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