A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou
Commentaires sur des extraits de Pantagruel
par Jean-Claude Raymond
Table des matières
Pour ceux qui arriveraient directement sur cette page, nous
signalons l'article Commentaires
sur des textes de Rabelais qui indique les raisons de ces
commentaires et l'esprit dans lequel nous nous plaçons.
Or, en cheminant, voyant Pantagruel que les lieues de France estoient petites par trop, au regard des aultres pays, en demanda la cause et raison à Panurge, lequel luy dist une histoire que mect Marotus du Lac, monachus, ès Gestes des Roys de Canarre, disant que : « D'ancienneté, les pays n'estoyent distinctz par lieues, miliaires, stades, ny parasanges, jusques à ce que le roy Pharamond les distingua, ce que feut faict en la manière que s'ensuyt. Car il print dedans Paris cent beaulx et jeunes gallans compaignons bien délibéréz et cent belles garses picardes, et les feist bien traicter et bien penser par huyt jours, puis les appella, et à un chascun bailla sa garse, avecques force argent pour les despens, leur faisant commandement qu'ilz allassent en divers lieux par cy et par là et, à tous les passaiges qu'ilz biscoteroyent leurs garses, que ilz missent une pierre, et ce seroit une lieue.
Ainsi les compaignons joyeusement partirent, et, pource qu'ilz estoient frays et de séjour, ilz fanfreluchoient à chasque bout de champ, et voylà pourquoy les lieues de France sont tant petites. Mais quand ilz eurent long chemin parfaict, et estoient jà las comme pauvres diables, et n'y avoit plus d'olif en ly caleil, ilz ne belinoyent si souvent et se contentoyent bien (j'entends quand aux hommes) de quelque meschante et paillarde foys le jour. Et voilà qui faict les lieues de Bretaigne, de Lanes, d'Allemaigne et aultre pays plus esloignéz si grandes. Les aultres mettent d'aultres raisons ; mais celle-là me semble la meilleure. »in Pantagruel, Chapitre XXIII
Or, en cheminant, Pantagruel voyant que les lieus de France étaient trop petites , en comparaison des des autres pays, en demanda la cause à Panurge, lequel lui dit une histoire que Marotus du Lac, monachus, ès Gestes des Rois de Canaries, disant que « Autrefois, dans tous les pays les lieus, les milles1, stades2, parasanges3, jusqu'à ce que le roi Pharamond les distinga, ce qui fut fait de la manière qui s'ensuit. Car il prit dans Paris cent beaux et jeunes gallants compagnons bien décidés et cent belles jeunes filles picardes, et les fit bien traiter et bien soigner pendant huit jours, puis les appela, et à chacun attribua une fille, avec beaucoup d'argent pour les dépenses, leur ordonnant d'aller dans toutes les directions et, qu'à toutes les fois qu'ils baiseraient leurs filles ils mettent une pierre, ce marquerait une lieue.
Ainsi les compagnons partirent joyeusement, et, comme ils étaient frais et par plaisir, ils s'occupaient des dentelles à chaque bout de champ, et voilà pourquoi les lieues de France sont si petites. Mais quand ils eurent parcouru un long chemin, et étaient déjà las comme pauvres diables et qu'il ny avait plus d'huile dans la lampe, ils ne s'accouplaient plus si souvent et se contentaient (je parle des hommes) de quelques piteuses et paillardes fois par jour. Et voilà ce qui fait les lieues de Bretagne, des Landes, Allemagne et d'autres pays plus éloignés si grandes. D'autres proposent d'autres raisons , mais celle-là me semble la meilleure. »in Pantagruel, Chapitre XXIII
Beliner s'accoupler
(source : Lexique français — Consultation des atlas sémantiques —
Institut des Sciences Cognitives au CNRS).
Fanfrelucher Le
mot franfreluche
désigne des ornements légers tels que dentelles, nœuds, volants ou
pompons en habillment et ameublement. Dentelles, nœuuds, volants
évoquent les atours féminins. On peut donc penser que franfrelucher veut
dire s'occuper des dentelles et volants donc des jupons des filles.
Mais, à la lecture, j'ai pensé aussi à lucher (ou licher)
qui signifie lécher [11]. Un
jour mon grand-père, qui a passé toutes sa
vie à quelques dizaines de kilomètres de la maison natale de Rabelais,
racontait une histoire où des amoureux avaient été surpris derrière le
pailler à se perlûcher l'museau.
S'perlûcher ou s'perlicher
signifie se pourlécher [10].
A cela, il faut ajouter qu'on dit que le garçon qui lûche
la poêle aura
de la pluie le jour de son mariage. Tous ces sens résonnaient-ils dans
la tête de Rabelais au moment
de l'écriture.
Ce mot d'ancien français était encore utilisé par mon grand-père sous la forme chaleuil. Il est mentioné dans plusieurs glossaires de parlers tourangeaux ou poitevins (cf. l'article Chaleuil dans la site Antick — Musée virtuel d'objets anciens).
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A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou vous remercie de votre visite
Dernière modification : 2007-11-05 - 17:59:46
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