A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou
Bournand
près de Loudun (France-Vienne)
par Jean-Claude Raymond & Fernande Germain
Table des matières
La commune de Bournand, habitée par 862 personnes [écrit de 1892] (sur 3 343 hectares) possède plusieurs monuments intéressants de diverses époques. En commençant par l'ordre chronologique, nous devons, en première ligne, citer la Pierre-Folle, monument mégalithique, extrêmement intéressant et qui n'a jamais pu être étudié à fond. Cette allée couverte est de l'époque de la pierre demi-taillée. C'est, à notre connaissance, le plus grand monument de ce genre. Sa longueur totale est de 18 m 47, sa largeur moyenne de 5 mètres intérieurement et de 6 mètres extérieurement. Comme à la Roche-aux-Fées de Saumur, l'intérieur était divisé en deux et peut-être en trois pièces. L'entrée primitive, bien accusée par une baie de 1 m 05 de large, est obstruée, à l'heure actuelle, par une longue aiguille qui semble un menhir renversé. D'après une légende, que nous a rapportée l'excellent abbé Brücker, curé de Bournand, ce menhir était le dieu adoré par les habitants, à l'époque de Saint Martin. Ce dernier planta son bâton au pied de l'idole: immédiatement, le menhir fut renversé à la place où on le voit encore, et le bâton, prenant racine, devint un superbe mûrier dont les branches s'étendaient sur presque tout le monument. Malheureusement on voulut désinfecter par le feu l'étable disposée à l'intérieur de la Pierre-Folle; les flammes gagnèrent le mûrier et le réduisirent à l'état que reproduit l'héliogravure ci-dessous.
La couverture est constituée par trois dalles qui, jadis n'en formaient que deux. Leur épaisseur est comprise entre 0 m 50 et 1 m 80. La plus grande de ces pierres mesure 9 mètres de large sur plus de 8 m de long. Avant la brisure, elle avait 4 mètres de plus de longueur. Toutes les pierres qui composent le monument sont en grès rouge. La petite ferme Renaissance dont la cour enserre la Pierre-Folle ajoute au pittoresque de la situation. A peu de distance se trouvent les débris d'un autre dolmen ou allée couverte de moindre importance. L'importance de Bournand, affirmée aux premiers siècles par ces constructions gigantesques, ne s'est point affaiblie à travers les âges: en l'an 850, le 15 août, le roi Charles-le-Chauve, se trouvant à Cambrai, fit, à la prière de l'évêque Ebroin, plusieurs dons à l'abbaye de Saint-Maur-sur-Loire, lui concédant entre autres biens Bournand (Burnonium) avec cinq "facti", l'église dédiée à Saint Martin, les colons et les serfs des deux sexes attachés à ces domaines. Deux siècles plus tard, Garin-le-François et Oravie, sa femme, usurpèrent ces biens et ne les restituèrent qu'en 1066, sur l'injonction du comte d'Anjou, Geoffroy Martel; pour effacer le souvenir de cette exaction, Garin concéda aux moines la moitié des cens(*) des maisons construites autour de l'église et le droit d'établir un four banal. Geoffroy confirma cette donation et exempta les vassaux des religieux de toutes les prétentions élevées contre eux par le prévôt de Loudun pour les conduire à la guerre.
Georges Balleyguier, Jules-César Robuchon, Roger Drouault
in Paysages et Monuments du Poitou
1890
La Commanderie(*) de Moulins, ancienne dépendance de l’ordre du Temple, fut attribuée, après l’inique procès qui termina l’existence de cet ordre, aux chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem qui possédaient déjà la commanderie de Loudun, nous trouvons la preuve de son existence dès l’an 1216 dans le cartulaire de la Coudrie, où figure un jugement de Jean, abbé de l’Ile-Dieu, qui déboute les curés de Bournand et Solomé des prétentions élevées par eux contre les hommes des Templiers sur lesquels ils voulaient percevoir un droit paroissial.
Cette commanderie est plusieurs fois mentionnée, en 1313, dans les interrogatoires qui précédèrent le procès des Templiers : Geoffroy de Thalan, du diocèse de Tours, qui comparait le pénultième jour d’avril, dit avoir habité pendant environ un an la maison de Moulins où il a été arrêté ; de là, il fut conduit à Loudun, puis à Chinon, où il fut interrogé par le bailli de Touraine. Jean Durand, précepteur de la Coudre, déclare qu’il a été reçu vers la fête de la Pentecôte, douze ans auparavent, dans la chapelle de la maison du Temple de Moulins (in capella domus Templi de Molendinis). Parmi les commandeurs de Moulins nous citerons Philibert de Laisque (1424) Joachim de Saint-Simon (1527) François de Carbouys (1580) de Carbouys (1580) Christophe de Jousseaume (1614) Pierre de Vonne enterré dans la chapelle de Moulins le 20 octobre 1637 ; à cette époque cette commanderie était déjà réunie à celle de Loudun.
Une visite faite le 6 novembre 1717 par le chevalier de Bessay et Charles Gibot de la Perrinière nous apprend que le vicaire de Bournand venait célébrer la messe dans la chapelle une fois par semaine ; que dans cette chapelle il y avait deux petits tableaux ; au–dessus de l’autel se trouvait une Descente de Croix en plâtre surmontée d’un dais en bon état. On remarquait, du côté de l’évangile, deux tombeaux de pierre avec les figures de deux hommes dessus ; en descendant de l’autel, du côté de l’épître, on voyait aussi un autre tombeau en mausolée avec une figure d’homme. Les voûtes étaient propres et à six voussures ; la nef « bousillée »(*) avait 36 pieds de long. Au dessus de l’entrée de la commanderie régnait une galerie à embrasure ; la cour du donjon était séparée de celle de la ferme par une muraille de 6 pieds ; près de la chapelle du côté du midi se trouvait une grande fuie ronde et couverte d’ardoises.
Georges Balleyguier, Jules-César Robuchon, Roger Drouault
in Paysages et Monuments du Poitou
1890
Notes
Bousiller: Maçonner avec un mélange de terre détrempée et de paille. Ce mélange appelé bousillage en français est appelé bousilli dans la région de Loudun. Il était autrefois très souvent utilisé pour faire les plafonds entre les solives comme on ferait maintenant avec des briques et du plâtre. Les briques étaient autrefois remplacées par du bois fendu placé sur les sloives et perpendiculiarement à celles-ci. Il pouvait servir de chappe pour la pose d'un carrellage dans un grenier.Retour au texte.
Cens :
nom masculin désignant la redevance fixe que le possesseur d'une terre
payait au seigneur du fief.
Retour
au texte.
Commanderie :
En 1887 ce monument a été classé monument historique par les soins de
M.
Balleyguier.. La commanderie qui vient d’être récemment
restaurée appartient aujourd’hui à M. Jouanneaux,
propriétaire à Loudun. [édition 1892]. Retour
au texte.
Nord du département de la Vienne (86), environ 9 km au nord de Loudun (86200), proche de la D.147. IGN, carte touristique du Val de Loire au 1:250 000, pli 5.C.
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Dernière modification : 2008-01-04 - 19:38:31
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