A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou
Maurice Genevoix et la Loire
par Jean-Claude Raymond
Table des matières
La conquérante, la fantasque, la rivière aux menteuses langueurs, aux brusques et terribles colères… elle est sauvage, sauvagement libre ; elle se garde et brise toute contrainte, d'où qu'elle vienne.»
… Par deux fois, après la première guerre mondiale, l'écrivain que j'étais devenu avait déjà cédé à l'appel de la Loire retrouvée. Tout ce qui, avant l'épreuve tragique, m'avait été bonheur de vivre , sentiment d'expansion de l'être, allégresse de liberté demeurait lié pour moi à ce miroir d'eau nonchalante, à cette coulée de lumière changeante qui cernait, embrassait, caressait le coteau de ma petite ville, qui éclairait inoubliablement les horizonsq de ma province. C'est par eux que j'avais accédé au sentiment de beauté.
[…]
… Mais je voudrais aussi, d'un même vœu, que le monde des apparences où sinue le beau fleuve qui m'acharmé toute ma vie ressemble à ce qu'il est, en vérité : un monde éternellement vierge, merveilleux, inépuisablement fleurissant ; autrement dit le monde de l'enfance, où ceux qui deviendront des hommes, mieux qu'ils ne le sauront jamais, savent admirer, comprendre et aimer.
Maurice Genevoix
in le préambule de La loire, Agnès et les garçons
… Je ne revois jamais la Loire poursuivit la voix chuchotante, sans penser à ce jour-là. On croit que c'est un fleuve qui coule ; de l'eau qui glisse en reflétant le ciel. C'est quelque chose bien sûr. Mais la vie, hein ? Toute la vie…
Maurice Genevoix
in La loire, Agnès et les garçons, Première partie - II
Elle [la Loire] aussi d'abord pétrifiée, livide, rosâtre, affreusement lugubre. L'embâcle, en plein courant, avait cabré de grands glaçons, les avait tués debout dans une poussière d'éclats broyés. J'avais sauté au milieu d'eux, j'en touchais la tranche glauque, minérale, tout de suite perdu dans ce désert figé, incroyablement silencieux. Une fois seulement, je m'en souviens, la glace s'est émue d'une longue plainte musicale. Pas un craquement, non ; comme une corde pincée dans la profondeur des eaux libres, interminablement vibrante.
Maurice Genevoix
in La loire, Agnès et les garçons, Première partie - II
Le chemin disparaissait là-dessous, parmi de gros blocs de silex que la Loire avait abandonnés, épais et roux comme des miches de huit livres.
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - II
La Loire où il entrait était une Loire de septembre, fraîche et basse coupée de bancs de grève où les herbes palustres piquaient déjà des touffes vertes ; Loire de vacances, entre toutes famillière. Les bleus, les verts, les glacis lilas ou roux, les moires, les fronces, les lueurs et les ombres, rien ne lui échappa, qui ne prît à ses yeux un sens immédiat et vivant.
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - II
En bas, à droite, étalée sur le Val, la Loire coulait, frisonnante de saulaies enfantées par les sables roses. A mesure qu'il descendait, elle montait vers l'horizon jusqu'à se confondre avec lui. Elle disparut derrière une levée.
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - III
Dérober la vue du fleuve pour la révéler tout à coup, c'est un des charmes de ces turcies1 de Loire, puissantes levées de terre dressées par les riverains contre la ruée des crues subites. Aux points des plus sauvages poussées, là où le fleuve furieux fait brèche et inonde des leiues de pays, leur épaulement devient énorme. La route , alors, escalade cette épaule, prend la place du chemin de crête et suit les méandres du fleuve.
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - III
Note
Entre les îles, la Loire rampait, filait, luisait en coulées ardentes sur un fond de galets roux. Friselante à la proue de ces îles et bourrelée de barres de soleil, elle les prolongeait à l'aval d'une double traîne mordorée, branches d'un fluide éventail entre lesquels dormaient, torpide, couleur d'émeraude, un remous ombreux et secret.
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - III
Droit devant lui, au-delà du frémissant dédale qui scintillait au pied de la levée, la Loire venue du Sud, descendait d'une seule coulée. Lisse, bleue, reflétant tout le ciel, et, très haut dans le ciel, un nuage rond éblouissant, elle emmenait les yeux jusqu'à une ligne d'un bleu soutenu, — le bleu des pins dans l'éloignement, — qui la cernait comme la berge d'un lac.
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - III
Le jour changeait insensiblement. Le ciel, la Loire demeuraient aussi purs, aussi bleus, mais le soir s'annonçait déjà au blondissement de la lumière.
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - IV
La Loire tournait, derrière d'immennses grèves caillouteuses où des “ tireurs de jard1 ”, à côté d'un tombereau attelé, pelletaient le sable à la volée sur un crible de treillis. Par-dessus la courbe étincelante, les horizons faniliersse levaient à leur rencontre…
Maurice Genevoix
in La Loire, Agnès et les garçons, Première partie - IV
Note
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A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou vous remercie de votre visite
Dernière modification : 2008-01-11 - 19:35:57
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