A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou
Rabelais et ses personnages
en Anjou, Touraine et Poitou
par Jean-Claude Raymond
Table des matières
©Françoise Plumey
Mon grand-père qui était agriculteur me racontait lorsque nous rencontrions quelques douces collines du Loudunais qu'elles étaient les pattins du géant Gargantua. Et, je comprenais très bien de quoi il parlait.
Mais vous qui me lisez vous, savez-vous ce qu'est un pattin ? N'allez pas imaginer que Gargantua se déplaçant en hiver avait chaussé quelque patin à glace ou encore des patins à roulettes pour aller plus vite.
Des définitions proposées par le Petit Robert, vous ne savez laquelle choisir. Aucune ne vous convient. Vous êtes perplexe devant ce patin qui n'a pas de roulette et que pourtant on roule. Déjà son côté humide hérité de la patte mouille nous rapproche pourtant de notre sujet. Peut-être s'agit-il de la pièce de tissu sur laquelle on pose le pied pour avancer sans salir le parquet, quand on a les chaussures maculées de boue ? Boue et eaux voilà deux indices importants.
Pour comprendre, il faut se reporter au patois de la Touraine. Je savais ce que voulais dire patter1, dépatter 2, se dépatter3 et j'en avais déduit la signification du mot pattin 4. Je m'imaginais bien un géant laissant tomber la terre de ses bottes de place en place.
Certains
disent que Rabelais aurait écrit :
« Un jour, Gargantua qui se rendait de Paris à Bordeaux
s'arrêta dans cette riante vallée du Clain. Il faisait très chaud et la
veille, il avait beaucoup plu. Il but une grande quantité de vin du
pays et il s'endormit. Lorsqu'il se réveilla, il voulut se remettre en
route. Impossible de marcher ! La terre en séchant avait
doublé le volume de ses bottes. Il secoua ses pieds si vigoureusement
qu'une motte de terre tomba sur la commune de Saint-Cyr, se fut la
Butte de la Haute-Flotte, la seconde motte vint tomber près de
Beaumont, ce fut La Butte de la Tour de Beaumont. » Je n'ai
pas retrouvé la trace de ce voyage dans les œuvres de Rabelais. Mais on
ne prête qu'aux riches et de toute façon cela n'a aucune importance. Si
vous vous déplacez pour voir le Futuroscope à quelques kilomètres au
nord, de la route nationale 10 vous pourrez voir la Tour de
Beaumont couronnant la butte du même nom. Cette colline est visible au
niveau de la Tricherie, sur la droite quand on descend vers le sud,
avec une tour médiévale.
Notes
Lorsque
j'étais étudiant, l'université de Poitiers était renommée pour avoir
conservé des traditions estudiantines très anciennes. La bonne humeur
de Maître Rabelais, la paillardise étaient de règle lors de la
Quinzaine Estudiantine animée par l'Ordre du vénéré Bitard, loué
soit-il.
Le Bitard, loué
soit-il, est un animal fabuleux. J'ai le souvenir qu'il possède une
tête de fouine, un corps de poisson, peut-être de carpe, des membres
postérieurs de lièvre, une queue de renard. Une procession avait alors
lieu dans la ville pour présenter la relique naturalisée et néanmoins
vénérée du dit Bitard, loué soit-il, aux autorités de la ville ; autant
d'occasions de vins d'honneur qui accumulés donnaient gaîté et force
aux voix tonitruantes, braillardes et paillardes.
Les dignitaires de
l'Ordre du Bitard, loué soit-il, étaient reçus par les autorités de la
ville : le maire, le préfet, l'évêque, le commissaire de
police. Le commissariat de police constituait, je pense, la dernière
halte et se prolongeait tard dans la nuit. Le lendemain paraissait,
dans la presse locale, une photographie. Rassemblés sur les marches du
commissariat. les étudiants étaient affublés de képis et les agents de
ville de faluches.
On prétendait que la
tradition de cette quinzaine remontait au moins à l'époque de Rabelais.
Il est sûr qu'elle avait gardé un certain nombre des caractéristiques
des carnavals du Moyen-Âge .
A cette
époque et à la Renaissance, « À l'opposé de la fête officielle, le
carnaval était le triomphe d'une sorte d'affranchissement provisoire de
la vérité dominante et du régime existant, d'abolition de tous les
rapports hiérarchiques, privilèges, règles et tabous. C'était
l'authentique fête du temps, celle du devenir, des alternances et des
renouveaux. Elle s'opposait à toute perpétuation, à tout parachèvement
et terme…
« L'abolition de tous
les rapports hiérarchiques revêtait une signification toute
particulière. En effet, dans les fêtes officielles, les distinctions
hiérarchiques étaient soulignées à dessein, chacun des personnages
devait se produire muni de tous les insignes de ses titres, grades et
états de services et occuper la place dévolue à son rang. Cette fête
avait pour but de consacrer l'inégalité, à l'opposé du carnaval où tous
étaient considérés comme égaux, et où régnait une forme particulière de
contacts libres, familiers entre des individus séparés dans la vie
normale par les barrières infranchissables que constituaient leur
condition, leur fortune, leur emploi, leur âge et leur situation de
famille. »
Ces contacts libres, familiers entre des individus séparés dans la vie
normale par les barrières infranchissables sont réalisés ici par
l'échange des insignes les képis et les faluches.
Notes
Glossaire
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Dernière modification : 2007-12-10 - 15:28:03
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