Aranei-Orbis
Chansons et danses du temps de Rabelais

Jean-Claude Raymond


Sommaire
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Les chansons citées dans le Cinquiesme Livre

Rabelais dans le prologue du Quart Livre à donné une liste de musiciens de son époque dont plusieurs ont été identifiés et font l'objet de notes dans un article d'Aranei-Orbis. Ce livre comprend le texte d'une chanson reproduit ci-dessous. Le Cinqiesme Livre, chapitre XX, comprend une liste de 161 titres. Nous n'avons pas trouvé de notes explicatives.

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La question est de savoir de qui sont ces chansons, en a-t-on retrouvé les textes. Toute personne ayant des données sur le sujet seraient aimables de prendre contact avec nous à
Par avance merci.
Une chanson dans le Quart Livre : Grand Thibault se voulant coucher

Rabelais avait donné les paroles d'une chanson dans le prologue du Quart Livre dont l'origine des paroles est bien identifé. Il reproduit un

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dizain attribué à Mellin de Saint-Gelais dont le début est « Un mary se voulant coucher. »

« Grand Tibault, se voulent coucher
Avecques sa femme nouvelle,
S'en vint tout bellement cacher
Un gros maillet en la ruelle,
O ! mon doux amy (cedict-elle),
Quel maillet vous voy-je empoingner ?
— C'est (dist-il) pour mieux vous coingner,
— Maillet (dist-elle) il n'y fault nul :
Quand gros Jan me vient besoingner,
Il ne me coingne que du cul. »
En savoir plus sur ces chansons

Aranei-Orbis n'a pas trouvé d'études sur le sujet de savoir si les titres cités dans le Cinquiesme Livre correspondent à des chansons réelles et si oui lesquelles. Peut-être existe-t-il de telles études mais nous ne les avons pas trouvées.
Aranei-Orbis livre ici quelques pistes (liens à partir des titres de la liste). Des étoiles indiquent le degré de proximité avec Rabelais :
(****) pour des titres d'auteurs ou de musiciens cités par Rabelais avec une bonne concordance des titres,
(***) pour des titres d'auteurs ou de musiciens cités par Rabelais avec une bonne concordance des paroles,

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(**) pour des chansons de l'époque de Rabelais mais d'auteurs ou de musiciens non cités par Rabelais ou inconnus,
(*) pour des chansons populaires ayant un titre ou des paroles approchant les titres cités par Rabelais.
(C) pour des commentaires, des éclaircissements.

Il est possible que certaines pistes soient erronées. Aranei-Orbis espère vos remarques, ou contributions. Contactez-nous : chansonsrabelais@jcraymond.freesurf.fr

Liste des chansons citées dans le Cinquiesme Livre

Les noms sont cités dans l'ordre et l'orthographe donnés dans le chapitre XXXXIII bis - Comment furent les dames Lanternes servies à souper, in Rabelais - Œuvres complètes dans la Bibliothèque de la Pléiade, NRF, 1955, Paris. Certains pensent que le Cinquième Livre, publié de manière posthume n'a pas été totalement écrit par Rabelais au mieux a-t-on quelques chapitres de lui. La dernière édition de ce livre fut faite en 1564. Les chansons publiées sont de l'époque de Rabelais à 10 ans près.

Voici l'extrait du Cinqième Livre comprenant une liste de chansons :

« Le soupper finy, furent les tables levées. Lors, les ménestriers plus que devant mélodieusement sonnatz, fut par la Royne commencé ung bransle double, auquel tous, et Falotz et Lanternes, ensemble dansèrent. Depuys se retira la Royne en son siège ; les aultres, aux dives sons des bouzines, dansarent diversement, comme vous pourez dire :

Serre, Martin, (****)
C'est la belle Franciscane, (C)
Dessus les marches d'Arras,
Bastienne,
Le Trihory de Bretaigne, (****)
Hely, pourtant si estes belle,
Les Sept visaiges,
La Gaillarde,
La Revergasse,
La Goutte,
Marry de par sa femme,
La Gaye,
Male maridade, (*)
La Pamine,
Catherine,
Sainct-Roc,
Sancerre,
Nevers,
Picardie la jolye,
La Doulourouze,
Sans elle ne puys,
Curé, venez donc,
Je demeure seulle,
La mousque de Biscaye,
L'Entrée du fol,
A la venue de Noël,
La Féronnelle,
Le Gouvernal,
A la bannye,
Foix,
Verdure,
Princesse d'amours,
Le cueur est myen,
Le cueur est bon,
Jouyssance,
Chasteaubriant,
Beurre, fraiz,
Elle s'en va,
La Ducate,
Hors de soulcy,
Jacqueline,
Le grand hélas,
Tant ay d'ennui,
Mon cueur sera,
La Seignore,
Beauregard,
Perrichon,
Maulgré danger,
Les Grands regretz,
A l'ombre d'un buissonnet, (****)
La douleur qui au cueur me blesse,
Il est en bonne heure né, (****)
De Doleur de l'escuyer,
La Douleur de la Charte,
Le grand Alemant,
Pour avoir faict au gré de mon amy,
Les Manteaulx jaunes,
Le Moût de la vigne,
Toute semblable,
Crémonne,
La Mercière,
La Trippière,
Mes enffans,
Par faulx semblant,
La Valentinoise, (C)
Fortune à tort,
Testimonium,
Calabre,
L'estrac,
Amours,
Espérance,
Robinet,
Triste plaisir,
Rigoron, pirouy,
L'Oyselet,
Biscaye,
La Doulourouse,
Ce que sçavez,
Qu'il est bon,
Le petit Hélas,
A mon retour,
Je ne fay plus,
Paouvres gens d'armes,
Le Faulcheron,
Ce n'est pa jeu,
Breaulté,
Te grati, roine Patience,
Navarre,
Jac Bourdaing,
Rouhault le fort,
Noblesse,
Tout au rebours,

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Le Crappaulx et les Grues,
La Marquise,
Si j'ay mon joly temps perdu,
L'Espine,
C'est à grand tort,
La Frisque,
Par trop je suys brunette,
De mon deuil triste,
Quand m'y souv(i)ent
La Galiotte,
La fleurye,
Frère Oierre,
Va-t-en regretz,
Toute noble cité,
N'y boutés pas tout,
Les Regretz de l'aigneau,
Le Bail d'Espaigne,
C'est simplement donné congé,
Mon con est devenu sergent,
Expect ung poc ou pauc, (C)
Le renom d'un esgaré,
Qu'est devenu, ma mignonne,
En attendant la grâce,
En elle n'ay plus fiance,
En plainctz et pleurs je prens congé,
Tire-toy là, Guillot,
Amours m'ont faict desplaisir,
La Patiance du Maure,
Les Soupirs du polin,
Je ne sçay pas pourquoy,
Faisons-là, faisons,
Noire et tannée,
La belle Françoise,
C'est ma pensée,
O loyal espoir,
C'est mon plaisir,
Fortune,
L'Alemande,
Les Pensées de ma Dame,
Pensés tous la peur,
Belle, à grand tort,
Je ne sçay pas pourquoy,
Hélas ! que vous a faict mon cueur ?
Hé ! Dieu, quelle femme j'avoye !
L'heure est venue de me plaindre,
Mon cueur sera d'aymer,
Qui est bon a ma semblance,
Cauldas,
C'est mon mal,
Dulcis amica,
Le Chault,
Les Chasteaulx,
La Girofflée,
Vaz an moy,
Jurez le prix,
La Nuyt,
A dieu m'en voys,
Bon gouvernement,
Misonnet,
Pampelune,
Ilz ont menti,
La joye,
Ma cousine,
Elle revient,
A la moictié,
Tous les biens,
Ce qu'il vous plairra,
Puysqu'en aour suys malheureux,
A la verdure,
Sus toutes les couleurs,
En la bonne heure,
Or faist-il bon aymer,
Mes plaisans champtz,
Mon joly cueur,
Bon pied, bon œil,
Hau, bergère, m'amye,
La Tisserande,
La Pavane,
Hély, pourtant si estes belle,
La Marguerite,
Or faict-il bon,
L'Alaine,
Le Temps passé,
Le joly boys, (****)
L'heure vient,
Le plus dolent,
Touche-luy l'anticaille,
Les Hayes.

Encores les veiz-je danser aux chansons de Poictou, dictes par un Fallot de Sainct-Messant ou un grand baislant de Partenay le Vieil. »
Description ou commentaires sur quelques chansons
(L')Entrée du fol

La musique serait d'Anon (16e siècle).

Le disque Un Bal chez Rabelais, Ricercare, Ensemble des Instruments anciens de Zurich

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Harmonia mundi, Opus 36 [LP stereo] comprend deux suites d'Anon. L'Entrée du fol faisant partie de la première suite .Présentation du disque.
Expect ung poc ou pauc

Poc et pauc proviennent du dialecte gascon.

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Ils signifient peu.
(La belle) Franciscane (C)

Rabelais et le navigateur Jacques Cartier (1491-1557) sont contemporains. Cartier découvre le Saint-Laurent lors de son premier voyage en 1534 et prend possession de la Gaspésie. Il était mandaté par François Ier. En 1540, François Ier décide de créer un établissement en Amérique.

Jacques Cartier laissa trois Relations de ses voyages. La Franciscane désigne alors les

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terres conquises au Canada ou une partie d'elles. On utilisait aussi le terme de Neuve France. Nous n'avons pas retrouvé le texte de cette chanson. Peut-être était-elle satirique ? En effet, trouvés en abondance sur les rives du Saint-Laurent, Jacques Cartier avait fait provision de grandes quantités d'or et de diamants qu'ils avait rapportée à François Ier. En fait, il ne s'agissait que de pyrite et de mica.
(La) Frisque

« Frisque. C'est-à-dire gentil (L. I. — C. XXVII.), source les commentaires de Le

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Duchat sur une édition des œuvres de Rabelais. »
Il est de bonne heure né (****)

Une des parties de la messe L'Homme armé par Josquin des Prés. Il est de bonne heure né serait de Johannes Japart.

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Discographie : The Columbia University Collegium Musicum, direction R. Taruskin, Collegium stéréo JE 109-110 [LPx2].
(Le) joly boys (****)

La musique est de Claudin de Sermisy (vers 1490 - 1562).

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Au joly boys

Au joly boys, en l'ombre d'ung soucy,
M'y fault aller pour passer ma tristesse,
Remply de dueil d'ung souvenir transy,
Menger m'y fault maintes poires d'angoisse,
En ung jardin remply de noires flours
De mes deux yeulx feray larmes et plours.
Fy de lyesse et hardiesse! Regret m'oppresse,
Puis que j'ay perdu mes amours. Las !
trop j'endure, Le temps m'y dure,
Je vous asseure : Soulas, vous n'avez plus de cours !

Jouyssance (**)

Jouyssance (1540) texte de Clément Marot

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mis en musique par Claudin de Sermisy.
Male Maridade (*)

Une chanson populaire raconte la mésaventure d'une jeune fille mal mariée (male mariée = male maridade, en béarnais). Le titre est, de manière classique, le premier vers : Moun pay que m'a maridade. Le premier couplet est composé comme suit :

Moun pay que m'a maridade
La male ore debè esta.

Le texte complet et sa traduction sont donnés à l'adresse suivante : http://myweb.worldnet.net/~bcauhape/
chants_bearnais/
Moun_pay_que_ma_maridade.htm

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Le lien avec Rabelais est certes ténu mais cela nous permet néanmoins de comprendre la signification de male maridade et c'était l'occasion de faire connaître cette chanson béarnaise. On peut d'ailleurs se demander si les listes fournies par Rabelais n'ont justement un but didactique en dressant des sortes de catalogues. Ains,i dans le choix des chansons fait par Rabelais, on trouve beaucoup de titres provenant ou évoquant plusieurs régions de France.
Martin Serre (****)

Le titre généralement donné aux chansons est le début du premier vers. Il est donc pour la chanson qui suit : Martin menoit son pourceau... Nous avons attribué 4 étoiles car

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il est probable que cette chanson fut plus connue par la chute du dernier vers Serre Martin, plus représentatif du texte grivois. La musique est de Clément Janequin.

Martin menoit son pourceau au marché,
Avec Alix qui en la plaine grande
Pria Martin de faire le péché
De l'ung sur l'aultre, et Martin luy demande :
"Et qui tiendroit nostre pourceau, friande ?"
"Qui, dist Alix, bon remede il y a".
Lors le pourceau à sa jambe lya.
Et Martin juche qui lourdement engaine.
Le porc eut peur et Alix s'escria :
"Serre Martin, nostre pourceau m'entraine".


(L)'Oyselet
Une chanson de A. Févin porte le titre de Il fait bon aimer l'oyselet. Elle est publié dans Première initiation à la polyphonie vocale, tome I du XIIIe au XVIe siècles, voix égales. Format : 16 x 24 cm ; 44 pages. Recueil de 10 polyphonies faciles à 2 ou 3 voix égales de compositeurs célèbres ou anonymes.
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Seuls le rapprochement des titres et le fait que Févin est cité par Rabelais nous laissent supposer que la chanson citée par Rabelais puisse être Il fait bon aimer l'oyselet

(A l')ombre d'un buissonnet (****)

Musique de Josquin des Prés. L'Institut de recherche et d'histoire des textes (IRHT) présente plusieurs variantes du texte et plusieurs

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partitions. Quand vous serez sur la page de ce site faites une recherche sur buissonnet au moyen de votre navigateur.
(Le) Trihory de Bretaigne (****)

Le Trihory de Bretaigne apparaît dans l'Orchéographie (1588) de Jehan Tabourot (1520-1595), dit Thoinot Arbeau par anagramme. On y trouve le seul exemple musical de trihoris qui ait survécu. Même si ce livre a été publié après la mort de Rabelais, il présente l'avantage de prouver l'existence de cette danse. Le trihoris est une branle populaire de Bretagne (branle) au XVe et XVIe siècle. Cela ne garantit pas que celui qui est évoqué par Rabelais soit stritement celui qui est donné par Thoinot Arbeau.

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Dans l'Orchéographie, Thoinot Arbeau a recensé les basses-danses, tordions, voltes, pavannnes, gaillardes, courantes, allemandes, morisques, et canaries. La partition est accompagnée d'abréviations :
c = congé,
r = reprise
ss = deux simples
b = branle.

Des croquis illustrent le pas des danseurs.

La Valentinoise

La Valentinoise pourrait désigner Diane de Poitiers. Après la mort de son mari, elle devint la maîtresse du dauphin, puis élevée à la dignité de duchesse du Valentinois par le futur Henri II qui lui resta fidèle, même après son mariage avec Catherine de Médicis et malgré la différence d'âge.

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Intelligente, soucieuse d'amasser une grande fortune, d'un catholicisme intransigent, elle a probablement joué un rôle dans les persécutions contre les protestants. On peut penser qu'elle fut la cible de certaines chansons.
Triste Plaisir

Gilles Binchois (1400 - 1460) a écrit une chanson portant ce titre. Cela ne signifie en rien que Rabelais ait fait

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référence à cette chanson.
Provenance ou évocation de pays, régions ou villes dans les chansons citées par Rabelais

Basque (Pays)
Biscaye
La mousque de Biscaye
Béarn
Male maridade
Bretagne

Trihory de Bretaigne
Calabre
Calabre
Espagne
Le Bail d'Espaigne

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Gascogne
Expect ung poc ou pauc
Nevers
Nevers
Pampelune
Pampelune
Picardie
Picardie la jolye
Sancerre
Sancerre

Différentes danses de l'époque de Rabelais

Allemande (alman, allemana, alamain en Angleterre) : danse à deux temps, suivie à cette époque d'une danse à trois temps plus vive nommée la triple.
Basse-danse : danse de cour de mouvement lent et glissé, pratiquée par couple. Elle traditionnellement suivie de recoupes ou tordions qui sont plus animés.
Branle
 : danse populaire exécutée en cercle composé de plusieurs danseurs et danseuses en nombre plus ou moins grands. On distingue les branles simples et doubles de rythme binaire, des branles gais de rythme ternaire et les branles, aux rythme mélangés, appelés de Bourgogne. Il existait des variantes régionales en particulier le branle d'Écosse, le trihoris (trihory) de Bretagne et celui du Poitou.
Pour trouver plus d'information, en particulier des illustrations sonores de branles de Bourgogne, de Bretagne et du Poitou, rendez-vous à la page de Lady Phaedria's Music Collection. Faire des recherches avec votre navigateur sur Burgundy, Trihory et Poitou.

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Canarie : danse française à partir du XVIe, considérée comme exotiques (îles Canaries). Courante : danse où l'on saute, improvise, voire court.
Gaillarde
 : Danse d'origine italienne, proche du saltarello. Elle fait souvent suite à une pavane. Schéma à cinq pas. Rytme ternaire
Morisque
Pavane
(pavan en anglais) : danse de rythme binaire. Les pas est de deux pas simples, d'un pas double en avant, suivis de la même chose en arrière.Tordion : semblable à la gaillarde mais plus légère et plus rapide. Elle est de rythme ternaire. Elle suit habituellement une basse-danse. Le pas de base est le cinque pas.
Volte
 : danse dans la laquelle le danseur fait tourner plusieures fois la danseuse.
À la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou — Rabelais - accueil


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Mise à jour le : 2002-08-31