A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou
Hilaire Bouzon (mai 1909 - 2004)
Historien local et poète
par Jean-Claude Raymond
Table des matières
M. Hilaire Bouzon, architecte de la ville de Loudun, originaire de Sammarçolles à quelques kilomètres, a publié plusieurs opuscules sur l'histoire des monuments de la ville et du Loudunais ainsi que des recueils de poésie. Recueils et opuscules sont accessibles à la médiathèque de Loudun, mais ils sont aujourd'hui dans les bibliothèques des collectionneurs. Avec l'aimable et grâcieuse autorisation de M. Bouzon, Aranei-Orbis a entrepris de reproduire ses textes sur Domus Libri.
C’est avec une vive et profonde émotion que nous apprenons le décès de M. Hilaire Bouzon. Aranei-Orbis travaillait avec lui. Son métier d’architecte de la ville de Loudun l’avait amené à s’occuper des bâtiments de Loudun. Il avait su faire partager ses découvertes dans des opuscules comme Les Ponnes incinérées ou Les Caves de Lugdunum. Il était très attaché à Sammarçoles, au Moulin Duchesne (1), où il vivait encore il y a quelques mois (2004). Écoutons ce qu'il nous en dit :
Vingt générations de ma sage famille
Ont, durant cinq cents ans, chanté dans ce moulin ;
Gens heureux qui donnaient aux autres le levain
Béni par le Génie de cette eau qui scintille.
Le gai tic-tac s’est tu… En vain, l’onde pétille
Sous l’aube abandonnée, figée dans son chagrin.
Pauvre moulin trop vieux ! Par Dieu, par le Malin
Ses meules sont rongées ; sa charpente vacille…
En mes vertes années, j’ai appris sa chanson
Parmi le vent des prés, l’odeur de la moisson,
Chanson qui, dans mon cœur, est l’écho qui persiste…
L’eau coule encor… Pourtant le Génie de ces lieux
Enfui vers les cités est devenu hideux !
Moi, le Dernier Meunier, je chante… et je suis triste.
H. Bouzon
in Mon Moulin d’autrefois.
Octobre 1969
Il était très attaché à tout ce qui touchait au patrimoine, certes architectural comme son métier l’y portait mais aussi aux constructions simples et aux aspects humains, aux hommes et aux femmes qui les érigèrent ou les habitèrent. Il nous laisse de précieux témoignages dans Le Lavoir, Les Colombiers dans le Loudunais, Le Pressoir Casse-Cou du Loudunois, L’École de Crué, etc.
Il tenait à faire partager cet attachement. Il faut avoir lu Stèles brisées ou la Bretèche de Villiers-Sainte-Radegonde pour comprendre la profondeur de cet attachement. Devant le spectacle de l’ancienne petite église désaffectée qui se meurt, l’évocation du tableau L’Angélus de Millet a quelque chose de poignant et rend un vibrant hommage aux gens simples du pays.
Nous avions contacté Hilaire Bouzon pour lui proposer de publier sur Internet ses textes qu’il est difficile de se procurer. Il avait accepté avec joie et gentillesse ce travail que nous avons commencé et espérons terminer. Mais nous ne sommes que des bénévoles et sommes obligés de partager notre passion avec les contraintes quotidiennes.
A architecte, historien, honnête homme au sens de Rabelais, il faut ajouter poète.
Enfin pour terminer, Hilaire permettez-nous de conclure par ces vers extraits de votre poème Le Petit Homme.
Dieu, Dieu qu’est devenu cet homme ?
Du vent ?… Un Feu follet ?… Un Gnome ?…
Ou l’as-tu, dans ton Paradis,
Fais renaître en Immense Archange
Qui, là-haut, par un juste Change
Nous voit, ici-bas… Tous petits ? »
Peut-être est-il Sylphe aérien ?…
Ou bien aussi n’est-Il plus Rien ?…Hilaire Bouzon
Nous espérons, Monsieur, avec nos faibles moyens, contribuer à faire vivre votre mémoire.
Jean-Claude Raymond & Fernande Germain
En décembre 2003, Monsieur Hilaire remit, à Mme Fernande Germain pour Aranei-Orbis, un de ses derniers textes : promenade auprès du vieux moulin dont le tic-tac avait accompagné sa jeunesse.
Il
terminait son poème par ses trois vers, suivis de son nom et
de son âge. En quelque sorte un adieu avant l'heure :
Moulin, tes beaux jours sont finis…
Sois maintenant au Paradis…
Joyeuse Paix !
Le moulin s'était tu, aujourd'hui l'homme n'est plus, la voix du poète s'est tu.
Mon Moulin
Mon Regard s’arrête souvent
Sur ces Profils de Vieilles Pierres…
Le Temps les revêt à présent
D’un Dais, d’un vert linceul de lierres…Le Temps et l’Esprit malin
Ont commis ça !… Quelle Tristesse !
« Ça »…ce Tas !… C’était mon Moulin
Qui Jour et Nuit chantait sans cesse…Tic-Tac, Meule, Roue, Montoir,
Ont fait vivre des douces heures
Que le matin ou bien le soir
On évoque dans nos demeures…Ta Roue tournait sa chansonnette,
Ta chute d’eau à l’Unisson
Ton Blutoir avec sa baguette
Composaient l’Echo du VallonNotre charretier d’un jeune âge
Livrait aux clients plein d’entrain
La clarine de l’Equipage
Nous égayait par son refrain ;Pour moi cette scène première
Était symbole du gain
Donnant l’aliment nécessaire
A chacun son pain quotidienMais mon regard s’arrête plus
Sur cette valeur historique
Deux Tours du Moyen-Âge ou plus
Donnaient à l’entrée du mystiquePuis en me retournant je vois
Par dessus la masse inclinée
Sorte de brume : est-ce une Croix ?
Misère ! c’était la cheminée.Cher Moulin rose, fier et beau
Là tu n’es plus que cette chose
Inerte, figée, un tombeau…
Horreur ! toute ta vie est closeTous les gens d’antour, là, venaient
Comme sur la Place Publique
Commerçaient, bavardaient, riaient
Accomplissant l’œuvre classique.Réputé était mon chemin
Souvent des dames en toilette
Y venaient rencontrer quelqu’un :
Venir là était une fête !Devant tes restes cher Moulin
Certains rêvent d’une allégresse
Mais là, moi, je n’ai que chagrin
Et mon Sourire n’est que tristesse...Moulin, tes beaux jours sont finis…
Sois maintenant au Paradis…
Joyeuse Paix !H. Bouzon 94 ans
suvi de sa signature
Les brochures historiques d'Hilaire Bouzon que j'ai pu lire comportent souvent deux parties :
J'ai été
enthousiasmé par Stèles brisées ou la Bretèche de
Villiers-Sainte-Radegonde.
Voici les dernières lignes de cet ouvrage :
Une stèle brisée est un lambeau étincelant, car elle a porté en son temps une ardeur et une valeur humaines.
Que sa place ne reste pas dégarnie, même si là, c'était la stèle de l'oracle, ou celle du sacrifice, ou celle de l'adoration.
Si, sur sa place une autre stèle, quelle qu'elle soit, oserons-nous dire, rapproche autour d'elle une grappe de pélerins unis dans une même bonne volonté, alors cette communion dans un élan vers le meilleur ne pourra en définitive, qu'être salutaire.
Grès roses des dieux antiques, Bretèche de Villiers, Bretèche du monde entier, demeurez en place, demeurez longuement. Vous êtes l'une des facettes pures du miroir des âmes.
Tant que nous viendons à vous durera le sourire paisible de l'Humanité...
Car nous aurons été épargnés de l'INDIFFÉRENCE.
Et, à l'écart de l'indifférence, tant de gens trouveront toujours une fraternité, un idéal, une espérance... la saveur de vivre !
H. Bouzon
Novembre 1958
La saveur de vivre, voilà à n'en pas douter le plaisir que j'éprouve en coopération avec quelques autres Loudunais à l'animation ce site.
Certains travaux d'Hilaire Bouzon sont
présentés dans Domus
Libri où vous trouverez une bibliographie.
• (1) Duchesne : nous avons adopté cette orthographe car elle est employée par M. Bouzon lui-même dans un des schémas sur le moulin en question. Dans ce cas, on peut penser que Duchesne fasse référence à une famille et non à un arbre poussé près du moulin comme le laisse à penser l'orhographe de l'annuaire de France-Télécom. Bien sûr, nous serions preneurs de toute contribution qui éclaircirait ce point. (retour au texte)
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A la Croisée de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou vous remercie de votre visite
Dernière modification : 2007-12-13 - 09:46:42
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